Comment choisir votre voyage durable ?

Retour sur la table ronde du 15 juillet 2021 lors des Journées Respirations Durables à Paris.

Tourisme durable… quels enjeux et outils pour le voyageur au moment du choix de son voyage ?

Tourisme responsable, tourisme durable… comment repérer les acteurs véritablement engagés ?

Le tourisme durable ou responsable attire de plus en plus. Tendance, il s’ancre progressivement et rapidement dans les nouvelles attentes clientèle. Il progresserait d’environ +20% par an. Et la crise sanitaire mondiale que nous vivons depuis plus d’un an a encore accéléré les prises de conscience vers le « consommer moins, consommer mieux, consommer responsable ».

Pourtant, les discours peinent encore à être suivis d’effets et de mises en action fortes et concrètes. Voyager responsable, oui mais comment ?

A l’occasion des Journées Respirations Durables 2021, François Huet (*Xpérientiel) et Béatrice Bellini (Positive Business Chair) ont eu le plaisir d’animer les débats, avec des invités experts passionnés et inspirants : Julien Buot (Agir pour un Tourisme Responsable – ATR), Laure Garcia (AFNOR), Agnès Decramer (Feelingo), et Eric Estegassy (Rategreen) nous ont partagé leurs visions et ont tenté de lever les freins et ambiguïtés pour passer du simple discours aux actes concrets.

 

Qu’est-ce qu’un voyage ou un tourisme durable ?

Avant d’aller plus loin, il convient de définir ce qu’est un voyage durable, du point de vue du voyageur.

*Le tourisme durable existait bien avant la crise Covid !

La prise de conscience que le développement économique pouvait avoir des impacts négatifs et parfois irrémédiables sur l’environnement et les sociétés apparaît progressivement depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Le rapport « Brundtland » de 1987 définit ainsi le Développement Durable : «un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. »

Le concept de Développement Durable repose sur trois piliers : l’environnement, le social et l’économie. Il est un appel global à une éthique de la responsabilité, qui place l’humain au centre du développement ainsi que le respect de l’environnement.

Ce concept va donner lieu à une interprétation de plus en plus précise et concrète dans le tourisme. Une Charte mondiale du tourisme durable est créée en 1995 à la Conférence mondiale de Lanzarote. L’année 2017 est proclamée « année internationale du tourisme durable pour le développement » par l’ONU.

*Alors… quelle définition pour un voyage durable ?

Reprenons la définition officielle de l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT) : « Les principes directeurs du développement durable et les pratiques de gestion durable du tourisme sont applicables à toutes les formes de tourisme dans tous les types de destination, y compris au tourisme de masse et aux divers créneaux touristiques. Les principes de durabilité concernent les aspects environnementaux, économiques et socioculturels du développement du tourisme. Pour garantir sur le long terme la durabilité de ce dernier, il faut parvenir au bon équilibre entre ces trois aspects. » (…)

Nous retrouvons les trois piliers du développement durable (social, économique et environnemental) : « Le tourisme est un phénomène social et culturel qui a des répercussions sur l’économie, sur l’environnement naturel et bâti, sur la population locale de la destination et sur les touristes eux-mêmes ».

Voyage responsable, voyage durable… Si les grands principes sont clairs, opérationnellement chacun se l’approprie selon ses critères, et l’on voit apparaître de nombreuses définitions et chartes personnalisées par les associations, labels et acteurs du tourisme. On y retrouve à chaque fois le respect de la nature et de notre belle planète d’une part, le respect des hommes et des populations d’autre part.

Les participants à la Table ronde ont mis en lumière une notion supplémentaire qui leur semble clé : la sobriété. Ils évoquent une attention particulière aux moyens de transport, les plus écologiques possibles y compris sur place (priorité aux déplacements doux : à pied, à vélo sans forcément aller loin), mais aussi une certaine sobriété dans le choix des activités (locales, en adéquation avec le territoire visité), le recours aux circuits-courts. En parallèle des aspects environnementaux, voyager durable c’est être riche de rencontres avec le territoire visité, de belles rencontres avec ses habitants, s’intéresser réellement aux cultures locales, s’immerger dans le respect et la découverte.

 

Tourisme durable : des acteurs engagés au quotidien

Au-delà de ses définitions théoriques, le tourisme durable est incarné par de nombreux acteurs du tourisme, au quotidien. Julien Buot (ATR) et Laure Garcia (AFNOR) rappellent que ces acteurs s’engagent volontairement, dans une démarche de progrès.

*Quel est le rôle et la pertinence des labels ?

« Une certification est difficile à expliquer. On oublie souvent que la certification c’est aussi de la performance » (Laure Garcia, AFNOR). Devant la complexité des notions liées au Tourisme durable, la labellisation, quelle qu’elle soit, est une aide et un outil de diagnostic pour les acteurs du tourisme souhaitant s’engager dans des actions concrètes et sur le long terme. Personne n’est parfait, il y a toujours moyen de s’améliorer. La labellisation est plus une philosophie et un accompagnement qu’un état des lieux strict et rigide.

*Quel label choisir ?

Chaque label retranscrit une certaine vision du tourisme durable. Le choix pourra différer selon l’importance donnée à telle ou telle caractéristique du tourisme durable. Béatrice Bellini (Positive Business Chair) nous rappelle qu’on ne peut pas être excellent sur tout : « Il y a des choix à faire, il faut choisir ses axes, sur l’environnement, le social…et l’économique. »

Il peut être stérile de vouloir opposer les labels, ceux-ci sont complémentaires. Pour Julien Buot, « la grande diversité de labels [si elle complique la compréhension pour le voyageur] est même un signe de dynamisme. Il est parfois difficile de s’y retrouver mais en même temps c’est plutôt sain et cela engage le voyageur à s’y intéresser et à s’impliquer. »

Il convient également de rappeler que de nombreux acteurs du tourisme sont engagés sans forcément être labellisés. Cela rajoute de la complexité pour le voyageur au moment du choix de son voyage.

Au-delà des labels, Julien Buot nous conseille de prêter particulièrement attention à la façon dont les acteurs communiquent : « les plus engagés sont souvent les plus humbles, faites attention à ceux qui se présentent comme les meilleurs. »

 

Le rôle essentiel du voyageur dans le tourisme durable 

Le voyageur joue assurément un rôle essentiel dans la démarche collective de progrès vers un tourisme durable, car il a le pouvoir d’influencer par ses choix et ses actes d’achat.

Dans sa définition d’un tourisme durable, Agnès Decramer (Feelingo) nous parle de « tourisme en conscience », le voyageur est définitivement acteur de son voyage. Il est invité à s’intéresser et à se poser des questions. Là encore, personne n’est parfait, ce qui compte c’est d’être conscient de ses choix, les assumer en accord avec ses propres valeurs et s’engager dans une démarche d’amélioration de ses pratiques.

La démarche du voyageur est alors similaire à celle d’un professionnel du tourisme : Comprendre – Mesurer – Agir ! En tant que consommateur, le voyageur a le pouvoir …s’il prend le temps ! Aujourd’hui, peu savent reconnaître ce qui est vraiment durable ; il y a un vrai besoin d’éducation sur le « durable ».

 

*S’informer et faire les bons choix 

Un voyage durable se prépare. L’avant-voyage est clé pour concilier, en conscience, respect et plaisir !

Nos invités pointent la responsabilité des TO et agences de voyage dans l’information des voyageurs, qui participent pleinement à la chaîne de valeur : conseils, informations sur les pratiques à destination, les cultures locales, les engagements de leurs prestataires, les différentes alternatives pour le transport, pour l’hébergement…

 

*Les nouvelles plateformes d’hébergements et voyages responsables  

Ça bouge côté plateformes de vente en ligne ! De nouvelles plateformes, moins onéreuses que les « grandes », se multiplient sur le tourisme durable. Parmi elles : Feelingo, Vaovert, Ethik Hotels, Greengo, We Go Greener… Laure Garcia (AFNOR) salue l’arrivée de ces nouveaux acteurs : « les établissements n’ont pas les moyens de communiquer, il faut aider les établissements engagés ».

Pour toucher le plus grand nombre et donner les clés à tous sur l’ensemble des plateformes, Eric Estegassy a lancé Rategreen : une note est directement rattachée à chaque voyage réservable en ligne, quelle que soit la plateforme ou le site de vente. Le système de notation a été développé en partenariat avec l’AFNOR, pour le moment il prend en compte le transport (avion, train, voiture) et l’hébergement de chaque voyage ; les labels sont également mis en avant.

 

Une démarche collective de stratégie à impact ?

Le tourisme durable est l’affaire de tous, le voyageur a certes un rôle essentiel mais il n’est pas le seul. Chaque acteur du tourisme a un rôle à jouer dans l’écosystème. Et notamment un rôle d’éducation et de sensibilisation, de formation aussi pour savoir identifier et communiquer les bonnes informations aux voyageurs.

Selon Eric Estegassy (Rategreen), la dynamique devrait aussi être impulsée par l’ensemble des entreprises, toutes parties prenantes via leurs engagements RSE ; elles ont le pouvoir de renverser les codes du voyage d’affaires.

Quant à Julien Buot (ATR), il appelle les acteurs publics à prendre leurs responsabilités : celle de créer un cadre favorable afin de faciliter les initiatives et les engagements concrets. Aujourd’hui, les plans de relance sont une magnifique opportunité pour orienter et guider les entreprises vers plus de durabilité et de responsabilité.

Les parties prenantes sont multiples, comment les impliquer collectivement ?

Le tourisme est d’autant plus complexe que les touristes et donc les clientèles sont multiples également. Béatrice Bellini (Positive Business Chair) nous interpelle : « N’est-il pas urgent de définir une logique et des indicateurs de filière ? », en nous rappelant que « 20% de l’activité font 80% de l’impact »…

 

La solution ne se trouve-t-elle pas dans un énorme travail d’éducation, tous profils confondus ? pour « casser les automatismes » et peut-être retravailler la définition du « voyage » en tant que tel ?

Tous les intervenants de la table ronde partagent un même objectif = aller plus loin, car « il y a encore beaucoup à faire ». Et une conviction = en tant qu’espace ultime de liberté, en miroir de la société, le tourisme doit contribuer à inventer un nouveau modèle qui fait sens, plus humain, et plus respectueux du vivant.

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